L’ingérence de la famille dans votre vie de couple, vous connaissez ? Si la réponse est affirmative, l’article ci-dessous a été écrit pour vous !

Une boutade israélienne affirme que si Adam et ‘Hava vivaient dans le jardin d’Eden, c’est parce qu’ils n’avaient pas de belle-famille pour semer entre eux la zizanie… Vous aussi souffrez de l’ingestion de votre belle-famille dans votre couple ? Ou bien peut-être, à l’inverse, est-ce vous qui avez du mal à mettre un terme aux immixtions de vos parents ? Peut-être alors vous reconnaitrez-vous dans l’un des scénarios suivants :

Michaël et Michaëla forment un jeune couple adorable depuis leur mariage, il y a tout juste un an. Le hic, c’est que dès qu’une fête pointe à l’horizon, la question de savoir chez qui celle-ci sera célébrée devient un sujet à haut potentiel explosif. Michaël est algérien, Michaëla est marocaine ; chacun tient à ses coutumes et ses habitudes. C’est sans compter sur le fait que la famille de Michaëla est plus observante que celle de Michaël, ni sur celui qu’elle a déjà accepté de passer Roch Hachana chez ses parents à lui et qu’il serait grand temps, à son avis, qu’il lui rende la pareille…

Johan et Johanna sont mariés depuis plusieurs années déjà. Ils s’aiment, et, globalement, l’on peut dire que l’entente règne dans leur couple. Cependant, il y a un bémol. Johan est en effet le fils unique de parents qui ont attendu de longues années sa venue au monde (et celle-ci n’eut lieu qu’après de longs traitements accompagnés de Téfilot et de bénédictions de célèbres Rabbanim). Après avoir passé des années à suivre de près son évolution physique et mentale, à veiller des nuits blanches à son chevet dès que le thermomètre affichait plus de 37.5°C, après avoir prié sans relâche pour la réussite de son fils, voilà que Mme Cohen le voit livré aux mains d’une apprentie qui semble avoir décidé de tester ses expérimentations culinaires sur son jeune époux. Mme Cohen, en bonne amie, aimerait juste offrir ses conseils avisés à sa novice de bru afin de lui inculquer l’art de prendre soin de son rejeton. En effet, on ne peut passer sous silence le fait que l’équipe médicale de la clinique où a accouché Mme Cohen il y a 30 ans semble avoir malencontreusement sauté l’étape de la coupure du cordon ombilical, ce qui eut pour effet de créer une longue liste de complications sur le système psychique de Mme Cohen et de son fils sur le long terme…

Site en construction – Entrée interdite !

La première étape pour gérer l’immixtion de la famille dans le couple est étonnamment de… faire sa propre introspection ! Quelqu’un ne pénètre dans un domaine que si on l’a invité à y entrer… C’est pourquoi la Torah enjoint : « Ainsi, l’homme quittera son père et sa mère pour se lier à sa femme, et ils ne formeront qu’une seule chair » (Béréchit 2,24).

Certes, nos parents ne veulent que notre bien, et s’il leur arrive parfois de commettre des erreurs, c’est rarement (pour ne pas dire jamais) dans une intention avérée de nuire. Pourtant, si nos parents ont la fâcheuse habitude de s’ingérer dans notre vie de couple, de donner régulièrement leur avis sur la manière dont nous devrions mener nos carrières, éduquer nos enfants, gérer notre argent, voire pire, s’ils essaient de nous instrumentaliser pour les représenter auprès de notre conjoint, c’est peut-être que nous-mêmes n’avons pas su dès le départ prendre le virage correctement. Car la configuration qui prévalait avant le mariage (Papa-Maman-moi-mes frères et sœurs) était valable uniquement jusqu’au mariage, et non plus après. Désormais, le schéma ressemble davantage à : nous-nos enfants-nos familles respectives. La vie de couple représente un équilibre fragile qui se construit lentement, à force d’efforts et de persévérance ; il convient dès le départ de suspendre à l’entrée de notre foyer une pancarte virtuelle où il serait écrit : « Attention, chantier en construction, entrée interdite ! ».

Evidemment, il n’est pas question de couper les ponts avec notre famille, D.ieu préserve, mais de comprendre que, dorénavant, nos priorités sont tournées vers notre couple et que toute ingérence étrangère n’est pas souhaitable.

Une échelle posée à terre dont le sommet atteint les cieux…

L’une des entreprises les plus ardues des époux sera en fait de créer ce que l’on pourrait nommer un « troisième espace ». Il s’agit d’un lieu qui n’est ni celui de l’époux lorsqu’il était célibataire, ni celui de l’épouse lorsqu’elle était célibataire, mais d’un espace entièrement dédié au couple, une nouvelle entité indépendante. Pour le créer, il ne s’agit plus de se demander : « Quelles concessions puis-je faire pour mon mari ? », mais plutôt : « Qu’est-ce qui est bon pour nous ? ». Cette entité est composée des éléments éducationnels, des valeurs, du background avec lesquels chacun des époux est arrivé au mariage, épuré de tout ce qui peut nuire au bon fonctionnement du couple.

Lorsque Ya’acov Avinou était en chemin pour rencontrer son frère Essav, il fit une halte pour s’endormir. C’est alors qu’il eut un songe, dont la symbolique restera célèbre : une échelle posée à terre dont le sommet atteignait les cieux. Et nos Sages d’expliquer : Its’hak Avinou, père de Ya’acov, se maria de suite après avoir été ligoté par son père Avraham sur le mont Moriya. Il entama donc son mariage sur un mode hautement spirituel ; il était tout entier consacré à D.ieu. Rivka, quant à elle, venait d’un tout autre milieu : ‘Haran, ville célèbre pour son abondance matérielle et l’ambiance matérialiste qui y régnait. Après leur mariage, Its’hak et Rivka donnèrent naissance à Ya’acov, qui représenta l’attrait de Vérité (ou tempérance) par excellence. Or, justement, c’est cette capacité à faire fusionner les qualités des deux époux pour créer ce fameux « troisième espace » propre au couple, que l’échelle de Ya’acov vient symboliser : les pieds ancrés dans la réalité terrestre, elle s’élevait dans une aspiration toujours plus forte vers les hauteurs spirituelles. Ainsi donc, Ya’acov Avinou, fils de Its’hak et Rivka, était l’incarnation du fusionnement des qualités de ses parents.

Ainsi, l’on comprend que la bonne gestion du couple face aux ingérences extérieures est le résultat d’une réflexion sur ce qui est « bon » pour le couple et non plus sur la question de savoir « qui a raison ». Or, pour atteindre cet équilibre, il apparait essentiel de se consacrer à l’édification et à l’entretien de notre « troisième espace », en acceptant de nous détacher dans une certaine mesure de nos parents, de nos schémas de pensée et de nos habitudes.